Le progrès
Quelques notes sur le " manifeste accélérationiste"
http://www.multitudes.net/manifeste-accelerationniste/ présenté par Mathilde.
Le manifeste accélérationniste, publié en 2013 par deux universitaires anglais, traduit dans la revue Multitudes en 2014, était débattu en 2016 à l'Académie d'été d'Ars.
Industrialis, association qui critique entre autre chose l'accélération technique, variante du déferlement technologique dont nous parlons à Technologos.
"Ce vers quoi nous pousse l’accélérationnisme, c’est vers un avenir qui soit plus moderne, et d’une modernité alternative que le néolibéralisme est intrinsèquement incapable d’engendrer."
- Liste des maux sociaux et environnementaux crées par le neolibéralisme, en voie de désintégration à cause de leur accélération associée à la paralysie politique et une dé-radicalisation de la gauche, qui ne peuvent suivre autrement que par moult ajustements structurels et privations galopantes de la chose publique.
- Accélérations, dislocations sociales à l’intérieur même d'un capitalisme sans évolution aucune.
- Est soulignée l'opposition entre des techniques grandioses et les techniques médiocres : "au lieu d'un monde fait de voyages dans l'espace, de chocs du futur ou de potentiels technologiques révolutionnaires, nous vivons une époque où les développements concernent essentiellement des améliorations marginales de techno-gadgets consuméristes."
- On retrouve cette opposition chez l'anarchiste David Graeber, (figure d'Occupy Wall Street ) : il évoquait "les techniques poétiques (aller dans l'espace, voler pour se déplacer...) contre des techniques bureaucratiques basées sur le numérique pour mieux normaliser le quotidien des gens".
- Mais, retour aux développements marxiste et léniniste ayant repéré les potentialités de renouvellement intrinsèque au grand capitalisme (meilleur système possible). Ceci est ignoré par une gauche (pas du tout "accélérationiste") plombée dans l’échec assuré d'un "folklore politique nourri de localisme, d’action directe et d’horizontalisme intransigeant".
- Projet accélérationiste : société post capitaliste => accélérer l'évolution des technosciences, alliance technosociale indispensable, démocratie= "développement d’une maîtrise de soi collective." "avec une", autorité verticale légitime et collectivement contrôlée".
Création d'une nouvelle idéologie correctement théorisée.
Mise en forme d'une "nouvelle plateforme technosociale post-capitaliste " dans l'esprit d' "une politique prométhéenne de maîtrise maximale sur la société et son environnement" et en route vers "un avenir proprement alien" et "libérant nos horizons". - Ce manifeste nous amène à réfléchir sur les techniques qui nous façonnent et réciproquement, de discuter si elles sont bonnes, si on peut les choisir, si on peut se donner une orientation technique en tant que société, civilisation... Est ce un progrès ?
- Clair mépris pour la ringardise d'une gauche "relocalisée", pour les manifestations de rue, pures consolatrices, ainsi que la recherche des horizontalités "primitivistes" (tous égaux) ... alors la décroissance ???
Deuxième présentation à partir des "Rencontres de Pétrarque" de cet été sur le progrès
Présenté par Roseline : Michael Fossel, Jean Noël Jeanneney, Patrice Maniglier, Regis Debray et quelques mots sur le livre de F. Jarrige à la fin.
- Alors que tout le monde a une idée du progrès, en fait c'est chacun la sienne, avec quand même quelques recoupements. Celle, plusieurs fois évoquée, de W.Benjamin est l’aquarelle de Klee, l'Angelus novus, qu'il appelle l'ange de l'histoire et le voit regarder en arrière de tous les possibles non advenus, au milieu d'une tempête destructrice dont le nom est Progrès, cette illusion mortelle.
- Le "progrès" est un mot issu du vocabulaire militaire et qui signifie la progression des troupes.
- Des possibles étouffés, des promesses non tenues, des justifications pour le futur ( les mondes meilleurs) de toutes les horreurs (colonisation comprise) et des divers ravages , surgissent les luttes...pour un "monde meilleur", pas celui promis ... un autre, mais aussi à venir ...
- Sarte dit renier l'idée de progrès et vouloir en garder la naïveté d'y croire.
- Les choses sont inchangeables, mais il ne faut cesser de vouloir les changer. Regis Debray et d'accord avec S.Fitzgerald sur ce point.
- Impossible de savoir si le progrès est cyclique, linéaire ou en marche de crabe; il est affirmé par certains comme irréversible dans son inflation techno scientifique, mais réversible sur le plan politique et social. La preuve en est cette illusion du progrès technique qui a oublié les passions archaïques qui actuellement, remontent violemment de nos rhinencéphales primitifs submergeant le néocortex, siège fragile de l'intelligence technicienne.
- François Jarrige ( Technocritiques - la Découverte 2014/2016) vient nous montrer que malgré les promesses technophiles du bonheur à venir, critiques et résistances multiples ont foisonné depuis l'industrialisation des sociétés. Il en fait l'histoire.
- Il souligne la rhétorique majeure de "l'adaptabilité" développée par les techno optimistes pour disqualifier la critique comme étant passéiste et réactionnaire. L'affirmation définitive de la neutralité des techniques rend l'idéologie du Progrès, de la croissance et de l'innovation non questionnable.
- Il ne s'agit pas de détruire l'idée de progrès, mais de le dissocier du développement techno scientifique qui ne peut être le seul un étalon du bonheur.
- Il y a un rôle moteur de l'indignation dans les luttes, qui n'aboutissent pas forcément à un lieux-être mais viennent toujours d'un mal-être.
Ce qui fait une sorte de lien avec notre prochain débat sur Les résistances.