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Soumission

Présentation et résumé par Roseline

-- Cette approche de la question de la soumission vient dans la continuité de la précédente présentation faite en janvier  sur le sujet du "trouble mental", de son diagnostic et de son traitement, bien en phase  avec la tendance hégémonique et maniaque de nos sociétés à vouloir tout évaluer, classer, chiffrer.

La question de la soumission au bonheur au prix de la liberté posée par R.Gori est reprise ici :

Mais pourquoi donc, se soumet on si facilement ?

-- Nous sommes partis de la fiction de H. Stangerup intitulée :"L'homme qui voulait être coupable" dont le héros Torben va développer avec sa femme plusieurs formes d'insoumissions  à la normalisation des comportements d'une société idéale,  jusqu'à devenir le meurtrier de sa compagne ( de plus en plus soumise à son goût ) et en revendiquer  la culpabilité pleine et entière. Ceci va lui être refusé, au nom de la prise en charge par la société, du déni de responsabilité personnelle  dans les actes osés par les individus. La contrepartie étant le renoncement à la liberté et la responsabilité pour un bonheur aseptisé, sans remous ni désordre.

Cette histoire expose les méthodes utilisées pour aplanir les idées de bien et de mal, avec par exemple l'organisation des réunions Anti Agressivité dites AA, ou de la purge dans le  langage de toute expression à connotation négative... iL n'y a plus ni faute ni culpabilité , seulement des "accidents".

-- De Torben (XXs) à "La Servitude Volontaire " du jeune La Boétie ( XVIs ) la question de la soumission est donc posée en traversant les siècles. La Boétie l'abordera sous l'angle de sa durabilité (comme on dirait maintenant)  et des stratagèmes pour tromper le peuple, mais à peine sur le ressort individuel. 
"Soyez donc résolus à ne plus servir, et vous serez libres!" car seule la servitude garde le tyran au pouvoir .,

-- Au XVIIIs Rousseau pense que" L'homme est né libre..." et déplore qu'il soit "toujours dans les fers" principalement à cause de la servitude au travail. Il ajoute qu' "il est plus facile d'être assujetti dans la tranquillité que de vivre dans l'orageuse liberté"

-- Il  faut donc courageusement s' interroger sur "la complaisance à se soumettre", à se laisser "sadiser", ou "jouir"  d'être calculé, évalué, réifié nous dit R.Gori ; Il s'agit là d'un "masochisme" fondamental lié à la pulsion de mort contre la vie et la liberté. Il souligne une "passion conformiste" destinée à préserver "le bonheur normé".

-- Nous sommes au XXI s et sur le même thème J.M. Besnier ajoute le rapport entre "une mésestime de soi" plus ou moins angoissée et  l' idéalisation d'une machine tirant son autorité de la perfection, de l'invulnérabilité qu'on lui suppose. Il cite G. Anders à propos de " La honte Prométhéenne" de l'homme à avoir si mal agi et produit tant d'horreurs , ce dernier  accablé d'avoir à ce point démérité de sa liberté.

Bien sur qu'existe pour l'homme le libre arbitre, notion tout à fait centrale - humaine -  car il semble que c'est précisément de cela que la bienveillance technicienne nous offre de nous soulager, avec bonheur,  consommation, assistance et sécurité , afin de corriger l'imperfection de la nature en général et la nôtre en particulier.

Nous pourrions par exemple , grâce à la techno science produire des bébés parfaits ( Testart).

-- Même si R. Simone fait un réquisitoire sévère sur le comportement éclaté de l'homme numérique , envoûté par ce qu'il croit y trouver de liberté, jouissances immédiates, convivialités éphémères et ..démocratie participative...

... Qu'à cela ne tienne , le rêve transhumaniste est là , en poste pour l’avènement du post humain,  annoncé comme un au delà . et selon O. Rey , il s'agit en réalité d'un en deçà de l'homme, une régression monstrueuse à venir , régression de type infantile toute infiltrée de technologies dites d"augmentation" des fonctions organiques d'un corps morcelé.

80 milliards d'objets connectés sont prévus en 2020 ! belles augmentations en perspective...

 

Quelques références

"L' homme qui voulait être coupable" d' Henrik Stangerup  - 1979 - Cliniques méditerranéennes n° 74 en 2006
https://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=CM_074_0173&DocId=34960&hits=32+31+

"Pris dans la toile : L'esprit aux temps du Web" [« Presi nella rete. La mente ai tempi del web »] Gallimard, 2012- Raffaele Simone
http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Le-Debat/Pris-dans-la-Toile

Olivier Rey : le transhumanisme comme regression - les amis de Bartelby