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Compte-rendu du colloque "critique de la raison transhumaniste"

Collège des Bernardins, le 19 mai 2017
Réalisé à plusieurs mains (Roseline, Hervé et Mathilde), leurs anotations sont en orange.

Introduction

Texte de Jacques Testart : Résister au transhumanisme. Pourqui ? Comment ? 

Les interventions

Franck Damour, historien, essayiste - La galaxie transhumaniste -

On peut revenir à Maslow ( psychologue XX s) à l'origine de la gestion du potentiel humain. Coutrot utilise ce mot dès 1939. Il est fasciné par la planification, la rationalisation des sociétés. Ces idées, il les tient de Teilhard de Chardin. Ces gens (non scientistes selon Damour) ont influencé Huxley et ne s’intéressent qu’au futur.

1960 : Ettinger est militant de la cryogénie (auteur de SF).

1990 : Max More fonde le premier mouvement TH ( revue Extropy) en récupérant des bribes du mouvement cryogénique. Il s'inspire aussi de la philosophie libertarienne. On retrouve des fondateurs de l'hypertexte, du protocole www dans ce mouvement.

1998-2002 : Max More est plus critiqué comme libertarien par Bostrom, James Hughes. Il y a alors accélération de la diffusion avec  des relais dans le domaine scientifico-économique.

Premier mandat de G. Bush où les TH ont participé et ont été « utilisés » pour condamner Fukuyama qui l'avait considéré comme le mouvement le plus dangereux du monde
Actuellement, il y a deux groupes : un privé en Californie, un public à Oxford (Institute for the Future of Humanity).
Les libertariens assument leur darwinisme social. Il y a aussi un mouvement néomarxiste : les accélérationnistes.
Les TH s'inscrivent dans la tradition humaniste. Ils ont une vision du monde :

Post darwinienne : l'homme va pouvoir prendre en charge son évolution et ce tournant est irréversible.

Déterministes technologiquement : la question sociale ne les intéresse que par l'idée de la mort , simple  convention sociale.

Il n'y a pas de différence entre soigner et augmenter [!].

Les TH sont un soutien inconditionnel à la science.
En conclusion, les TH sont un retour de la gnose , une victoire à la Pyrrhus. Trois pistes de recherche :

Le TH est une belle histoire promue par les GAFA.
Le TH pourrait être l'éthique du capitalisme (une façon de se justifier).
Le TH est un mouvement religieux (similitudes avec l'intelligence design).

 

Céline Lafontaine, professeur agrégée de sociologie à l'université de Montréal - Bioéconomie -

Les enjeux de la bioéconomie ( le vivant  considéré comme une matière première)  du corps humain.  Le TH est le symptôme d'une logique techno-économique beaucoup plus vaste et complexe à saisir. En se focalisant sur le TH, on risque de ne pas voir qu'on laisse se développer la bioéconomie où les français sont parmi les meilleurs, ce qui les démotiverait de la critiquer.

Le contexte économique : on reste (surtout avec Macron), dans une logique d'innovation. Or depuis Roentgen (découvreur des rayons X)  on voit qu'il y a des limites. Ainsi le DoE (département de l'énergie) et l'état des EUA vont se questionner sur les problèmes d'énergie, de croissance à travers le modèle des OGM comme nouvelle matière première.
Le temps de la spéculation, et financiarisation généralisée est arrivé avec l’abandon de l’étalon or.

1980: deux lois sont importantes : Bayle-Dole act : les recherches faites à l'université deviennent brevetables. Et l'arrêt Chakrabarty  selon lequel des microorganismes sont brevetables.

La France n'a rien à envier aux EUA. Les chercheurs affirment qu'ils ne sont pas TH, mais ils font la même chose. En se focalisant contre les TH, cela risque d’échapper.

La bioéconomie a profondément changé notre rapport au corps. On est dans un retournement complet de la philosophie du procès de Nuremberg. Foucault avait bien vu que l'optimisme scientifique est associé à un pessimisme politique [ou à un défaitisme ?] parce que la raison humaine nous a amené jusqu’à l'holocauste. Après la guerre, la santé de l'homme [cf. définition par l'OMS]  devient un droit. Il y a donc une demande [parce qu'il y a une offre!] qui devient un droit. Les technologies de reproduction en sont le début.

Développement d un concept de biomédicalisation : tout devient biologique :

Privatisation/brevetage

Redéfinition de la santé pensée en terme de risque. D'où une surveillance de soi, une redéfinition de soi à partir de son génome. Logique de contrôle, de santé sous surveillance.

Entrée dans le domaine de la santé publique. La France est en train de constituer une gigantesque biobanque de cellules souches qui entraîne un surdiagnostic. On collecte aussi le sang menstruel.

Transformation des citoyens en biocitoyens : « droit à certains médicaments ».

Nouvelle représentation du corps.  La biocitoyenneté a été la question des femmes (la pilule). Revalorisation du pouvoir de changer son corps.

Conséquence : son corps devient un capital à investir. Becker (Nobel 92) ,  parlait du « capital humain ». Le corps entre dans ce capital. D'où le tourisme médical [dont reproductif]. Le capitalisme exploite la détresse [et même la suscite voire l'encourage]. Le modèle de la médecine translationnelle (en plus de la recherche de nouveaux outils de diagnostics) est la revendication du droit à l'essai sur soi de médicaments. L'Etat est alors vu comme paternaliste car il essaie de limiter les abus/risques potentiels.

Lors de Nuremberg, on a séparé la clinique de la recherche. Mais, couplé avec une revendication du droit à la santé par les patients et l'importance du corps/capital, on inverse les règles de Nuremberg. (Code de Nuremberg qui pose des principes en matière d'expérimentation médicale sur des sujets humains.) Dans l’expérimentation des  FIV, il y a une survalorisation de la souffrance (et non le contraire) des femmes qui subissent des stimulations  : plus c'est difficile, plus c'est salué !
N'y avait-il pas déjà un antécédent chez Donna Harraway  ( cyberféminisme)?

 

Françoise Brulliard, cadre de santé, Lariboisière - Fabrique des bébés où il est question des techniques de procréation assistée -

Plusieurs  raisons sont mises en avant pour les recherches, coiffées par le discours sur la sélection naturelle dont il ne s'agit que d'améliorer l'efficacité,  jusqu'à mettre au point le choix des éléments de production d'un enfant parfait, seulement définis par les critères sincères ou douteux de géniteurs argentés.

Platon avait envisagé un gouvernement qui désignerait ceux aptes à être parents. A Singapour, les femmes n'ayant pas fait d'études n'ont pas le droit d'avoir plus de deux enfants.

L’existence de banques  de gamètes (supermarché de gènes de la puissance dans tous les domaines) aux USA, Danemark ...ainsi que le diagnostic pré-implantatoire, trouvent à se justifier au nom du souci politique de "Santé Publique". Une modalité de "purification" que F. Brulliard n’hésite pas à qualifier d"eugénisme libéral"  et de "totalitarisme individualiste". Par l'achat de gamète, on passe de la confrontation à l'Autre à un enfermement en soi.

La poussée techno-scientifique dans ce domaine offre de telles perspectives de profit, que des milliards sont mis à disposition de la recherche, en particulier aux USA, rendant impossible l'imposition de toute limite, de tout questionnement éthique, toujours en retard d'une marche. Ce temps de réflexion n'est pas celui du marché et la transgression ontologique des origines finit par être entérinée, entrainant l’acquiescement. La modification des lignées  produit de fait une "bouillie génétique" où tout assemblage, éventuellement incestueux, devient licite, plutôt sans loi.

Qu'en est il du ventre des femmes ? un seul contenant pouvant se monnayer ? et le saut sera vite franchi de créer un bébé … hors sol (ectogénèse, le mot existe déjà !) ou dans un ventre masculin quand l'utérus artificiel sera ... en marche. [Donc plus besoin de femmes, tiens donc !!]

Le Comité d'éthique n'est-il qu'un groupe de gens qui se demandent quand on va pouvoir céder à la pression sociale [ou de certaines catégories de demandeurs] ? [cf commentaire 3] 

Mais lorsque nous entendons deux scientifiques plongés dans la recherche la plus moderne, l'avenir est moins sombre.

 

Pierre Pollak, chef de service en neurologie, Genève - Amélioration, fantasmes et réalité -

Nous sommes donc un moment réconfortés : la recherche pour la "neuro amélioration" (novlangue du transhumanisme ?) est beaucoup moins performante que certaines annonces spectaculaires le donnent à penser

Ce qui marche vraiment sont les implants auditifs et oculaires, à la condition de nerfs sains.

En cas de paraplégie, le bon état du cerveau est requis pour donner une toute petite chance à un signal électrique signifiant (ordre pensé en vue d'un mouvement) de passer du tissus biologique au tissus mécanique. Ceci, grâce à un algorithme, afin d'activer un exosquelette.

Dans la maladie de Parkinson, le tremblement peut être soulagé par une impulsion inhibitrice dont la juste fréquence a été découverte par hasard.

Beaucoup de fonds dédiés à la recherche sur la mémoire, l'attention et le vieillissement, promettent d'aboutir rapidement.

P. Pollak souligne le manque d'humilité total des transhumanistes, généralement dans la surenchère scientifique. [pour habituer, fasciner ?]

La tonitruante découverte de la molécule  CRISPRcas9 dite "ciseau génétique" et qui excite tant les médias, a un intérêt sérieusement limité par ses réactions en chaîne sur les réseaux neuronaux étant aussi imprévisibles qu’incontrôlables. [tout comme nos réseaux sociaux]

La vision TH du corps comme une somme de fonctions séparées et séparables est un fantasme, ou  encore celle du cerveau séparé du corps est tout simplement fausse. Le cerveau ne peut être transformé  de l'extérieur à volonté, puisqu'il le fait de lui même en continu . Il est  plastique (si on influe quelque part, il se défend et se modifie ailleurs, et en particulier au niveau de  micro organisations  qui se changent elles-même en fonction de l'extérieur et des pensées et donc du sens ). On peut parler d’ une fonction holistique  du cerveau avec ses réseaux spécifiques à l'humain.
Et pourtant l'homme/machine en interface permanente par son cerveau avec l'ordinateur, est annoncé pour 2045 [il faut un chiffre … même faux]. La différence entre amélioration et réparation aura disparu depuis longtemps.

A la question « est-ce possible », P. Pollack répond que c'est trop compliqué [pour l'instant?]
Il y a grand danger à modifier le cerveau car L'homme est un animal social [vrai, mais ca ne prouve rien sur la faisabilité des promesses TH]. De toute façon l'homme est aussi dans des réseaux d'altérité, de l'empathie [et alors ? On ressort un discours rassurant sur l'humanisme …pour l'enterrer?].

 

Jean Gabriel Ganascia , université P.et M. Curie - Robot et cyborg -

Une revue de l'état de la robotisation et de l'Intelligence Artificielle nous est présentée, tout en soulignant l'écart entre les prétentions des transhumanistes et la science, qu'ils veulent anticiper [afin de préparer les esprits à l'acceptation ?]. Les recherches dans ce domaine vont dans le sens de la disparition [fantasmée ?] du corps pour créer l'homme bionique. Celui du groupe Neuralink de E. Musk, tellement machinisé, doué d'une super intelligence (dans sa conception mécanique) qu'un avatar corporel d'emprunt devra être inventé = une réincarnation dite de la "singularité" [à la place d'un sujet en bonne et due forme]. Et ceci grâce  au Mind up loading, nous apprendrons à communiquer avec ce nouveau corps réincarné ... [cf commentaire 5]

Pistorius a eu deux lames comme remplacement de jambes. Une femme avait la même maladie, mais sur une seule jambe. Elle a demandé de se faire remplacer sa jambe saine par une deuxième lame pour courir plus vite. Que fait-on ? Les machines deviendront plus intelligentes que nous. Mais cette intelligence ne se réduit-elle pas à une capacité de calcul ?

 

Olivier Rey, philosophe, CNRS Paris - La logique transhumaniste -

Malgré ce genre d'annonce délirante, pseudo scientifique, Olivier Rey nous affirme qu'il ne s'agit pas d'un dérapage, mais d'une évolution inscrite dans l'histoire des sciences anciennes et modernes. Il y a une logique dans le déploiement de cette idéologie. Il faut prendre la mesure de ce qui arrive, porté par la  logique d'une économie de puissance dans l'air du temps, et de la possibilité de se saisir du corps humain comme d'un nouveau gisement.

La science ancienne s'intéressait à la nature comme ce qui apparaît de soi-même, mais très peu aux choses fabriquées. La science moderne s'intéresse essentiellement aux choses fabriquées et, quand il s'agit d'êtres qui naissent (et ne sont pas produits), à leur fabrique.

Pour Aristote, on ne pouvait pas vouloir sauver sa vie à tout prix, mais seulement la vie bonne. Pour Bichat (médecin), « la vie est la somme totale des fonctions ».

La tendance, même contestée (Kant), à mathématiser la nature est à l’œuvre (depuis Galilée) dans la pensée occidentale pour aboutir à l'ingénierie du vivant, poussé à l'extrême par le transhumanisme. C'est avec empressement, que s'élabore dans leurs laboratoires le projet technicisé de la lutte naturelle pour l'auto conservation, en proposant l'augmentation pour tous et en réalité, pour quelques-uns.

Le long cheminement de la pensée occidentale s'est attachée à extraire l'humain du système/monde auquel il appartient, le positionnant comme une exception et de fait comme maître du monde légitimé à faire ce que bon lui semble de la nature avec les dégâts que l'on sait. Et le transhumanisme, avec ses prétentions d’une maîtrise techno-scientifique du vivant dans son ensemble, porté par le poids de ses financements issus du libéralisme le plus agressif, son idéologie s'impose comme la réponse absolue à la déchéance infligée à la nature comme à ses habitants. Cette humanité vulnérable, inquiète, tout aussi prompte à l'émerveillement ou la surestime d'elle même, qu'à une mésestime profonde, honteuse de n'être que ce qu'elle est, au vu de la quantité de méfaits et d'horreurs dont elle est capable. Cette idéologie voudrait en être le terme, sous l'angle paradoxal de son auto conservation qui est aussi une fin en soi, détruisant l'humain faillible. [ paradoxe difficile à saisir : lutte pour l’autoconservation d’un être rendu infaillible mène à l’autodestruction de ce même être sous la forme faillible ... ]

 

Pierre Magnard, philosophe - La volonté de puissance -

Est repris sous l'angle intéressant de la " retenue," évoquée par Le Pic de la Mirandole, comme la marque de l'humain "surajouté" à l'univers , avec pour mission de "parfaire " une nature dite émiettée, car il en est le lien privilégié, l'officine, le creuset et même sa synthèse. Il était le mesureur. Il devient le mesuré. Le problème remonte à Protagoras [L'homme est la mesure de toute chose. Mais alors qui mesure l'homme ?]. Pour Aristote, la Puissance, pour se réaliser, doit renoncer à sa propre puissance.

Au lieu de cela : profanation, marchandisation et consumérisme... Dans le transhumanisme, la mission de l'homme, mesureur et mesuré, est prise à son propre piège, dans une confusion transgressive et sans la transcendance qui pourrait  garantir la retenue du désir de puissance.

 

Valentina Tirloni, philosophe, université Nice - La notion du dépassement des  finitudes -

Cette notion du dépassement comme possible voire nécessaire pour l'humain appelé à  transcender sa vie si souvent misérable. Mais l'émancipation projetée par le transhumanisme  n'est pas de nature spirituelle.
Julian Huxley (1957) : « L'homme est l'être qui a pour tâche la plus grande, la réalisation de ses possibilités ». [n'est-ce pas déjà un utilitarisme ?]. Mais la technique n'est plus un moyen, mais une fin. L'être s'est séparé de la nature (ce qui ne s’est pas produit selon les grecs et surtout Aristote). Pour Simondon, l'artificiel n'est pas du non naturel, c'est du naturel suscité. Pour Ellul, dans le système technicien, l'homme technicien est dépossédé de toute responsabilité, d'où un hubris. L'homme devient une monade car il ne communique plus. L'homme est perdu dans une société qui le déresponsabilise, le berce, sans le rendre adulte.

Que peut il rester de l'humain s'il est sauvé, réparé, connecté, augmenté, instrumenté et bionique ? Peut on parler de raison transhumaniste avec ce tableau d'une émancipation si trafiquée dont le bonheur serait d'éviter tout questionnement existentiel ?

Comment, encore parler de raison lorsque l'artificiel est du naturel sollicité ?

L'humain, antérieurement maître de la nature, en se déresponsabilisant, a perdu la main sur son évolution propre. [cf commentaire 8]

 

Monette Vacquin, - Frankenstein amélioré  -

En bonne psychanalyste, elle n'hésite pas à nous plonger dans cette part de nous même , très humaine, celle du monde pulsionnel primitif qui nous tient ou nous déborde, nous conduisant dans un irrationnel aux atours séducteurs de ... la raison pure. Cette raison qui veut donner et se donner à croire qu'on peut se débarrasser de l'imprévisible et du vulnérable de notre nature, cette raison est malade.

Le culte de la raison pure, mécanisée est bien proche et à plusieurs titres de quelques syndromes de pathologie mentale à tendance psychotique. Notons la toute puissance paranoïaque dont la force de persuasion est telle qu'elle ne manque pas d'entraîner croyance , adhésion et soumission. en chaine avec l'identification aux  mentors hallucinés et hallucinants par l'audace et le cynisme de leurs projections et pensées transgressives. Ils  exercent par là une fascination redoutable, touchant au mythe pétrifiant du regard de la Méduse, remplacé par la métallisation de Frankenstein Ce que le transhumanisme propose pour le corps en le découpant en fonctions à intensifier, jusqu’à la possibilité de fabriquer et remplacer des organes défectueux, n'est pas sans évoquer le syndrome hypocondriaque de la négation délirante d'organe (syndrome de Cotard).

Mais si l'idéologie transhumaniste se décline de façon très diversifiée, toujours pour le bien de tous ..., il n'est pas inutile d'en repérer les marques d'un inconscient archaïque, porteur de barbarie.

Chez les cosmistes , le "corps de viande" ainsi nommé, en dit long sur le désir d'en finir avec le monde de la chair pour un monde de fer, habité par un être post biologique métallisé. Sur le site des TH, on lit : « Laissons derrière nous le corps « de viande ». La chair est faible, mais le métal, ça c’est du solide ! Et puis c’est chromé, lisse, brillant, propre et beau. Inimaginable que l’intelligence ait pu choisir un medium aussi répugnant et fragile que cet assemblage d’eau sucrée et gélatineuse. »

Le "connais toi toi même " (représentant de la pulsion épistémophilique) doit se remplacer par un " conçois toi toi même" d'où se trouvent annulés la sexualité  de la reproduction et de fait la différence des sexes devenue sans intérêt.

« La technique a un projet : celui d'arraisonner le monde » (Heiddeger). L'offre crée la demande. On crée donc des mutants … de Panurge. Moravec : « Pour les robots, les humains seront une expérience ratée ». Renan : « la raison, qui n’a eu jusqu’ici aucune part à cette œuvre, laquelle s’est opérée aveuglément et par la sourde tendance de tout ce qui est, la raison, dis-je, prendra un jour en main l’intendance de cette grande œuvre, et après avoir organisé l’humanité, ORGANISERA DIEU ». Renan : « Ce monde supérieur que nous rêvons pour la réalisation de la raison pure n'aurait pas de femmes ».

 

Jean Michel Maldamé, o.p. , théologien - Incarnation comme accomplissement -

Après les sombres annonces des risques d'anéantissement de la reproduction sexuée, comme de la suppression de la mort, la présentation du théologien J.M. Maldamé a curieusement eu des allures de prêche en chaire, avec la répétition très appuyée du mot "chair" comme celle du pêché autrefois, mais sur le ton de sa défense ! Il s'agissait cette fois de rappeler le projet divin du "Verbe qui s'est fait chair ..." pour les chrétiens. Ainsi pour l'accomplissement de l'incarnation, le logos devient ce qu'il n'est pas, ou d'une autre nature [cf commentaire 10]. Il n'est pas question de mutation dans cette incarnation. Cette idée de mutation est à l'oeuvre  dans le transhumanisme : elle se dit comme la promesse messianique de l'homme nouveau au prix de tous les franchissements et en particulier ceux de l'origine et de la fin de la vie.
Notons que o.p. signifie l'ordre des prêcheurs (= dominicains)

 

Eric Fiat, philosophe Paris - Qu'un peu d'incarnation ne fait pas de mal  -

Nous parle des limites en nous amusant avec la fable de La Fontaine sur la grenouille qui veut s'augmenter jusqu'à la grosseur du bœuf et qui ne se termine pas très bien. Ce détour engageant pour nous parler de l' hubris, consubstantielle au vivant [ plus que l’hubris, je mettrai la créativité, l’invention comme consubstantielle au vivant ]

Mais il ne faut pas se contenter de dénoncer ou rejeter cette idéologie, il faut pouvoir la critiquer en interrogeant  le bon ou mauvais usage du dépassement, car, citant M.Serres :" il y a des merveilles dans l’informatique" ... est ce que la notion d'ange (réfléchie par le même auteur)  ferait partie de ces merveilles, parce que messager pur communiquant ? A cause ce ce corps léger, rapide, innocent, dégagé de sa corporéité, comme l'homme transhumaniste à venir ?  De plus, il est beau … de ne pas le savoir !…( comme la supposée perfection technicienne ?)

Il conclue avec la citation complète de Pascal " l'homme n'est ni ange ni bête, mais qui veut faire l'ange fait la bête" afin ne pas oublier les risques du dépassement .

 

Brice de Malherbe, théologien - Incarnation et gnose moderne -

C’est avec une condamnation sans ambiguïté du projet transhumaniste que B. de Malherbe clôture la journée, en rappelant l'humanité dans son rapport à la nature, à Dieu et à elle même dans son âme, son esprit et son corps.

Dans sa perspective d'amélioration dont le critère est l'homme/automate,  le transhumanisme refuse la condition spirituelle de l'homme pour l'affubler d'un corps semblable à un robot organique, le post humain, l'humain n'étant qu'une étape.

Certains vont s'opposer à cette évolution radicale, et ils deviendront rapidement une sous catégorie, exclue du progrès de l' hyperconnection, avec la création de valeurs  en collusion avec le libéralisme total et le libertarisme moral (la puissance financière et le chacun pour soi).

La résistance morale à cette idéologie technicienne et pseudo scientifique, en développant le front de la critique et l'éthique de responsabilité, ne laissera pas s'engloutir le sapiens dans le faber [ Se méfier de l’opposition savoir / faire]

 

Commentaires

3 terme emprunté à l’économie. Article récent sur autorisation de la GPA parle de dire à l’enfant le “contrat” qui est à son origine entre ses parents “d’intention” et sa mère porteuse : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2017/07/05/01016-20170705ARTFIG00008-gpa-la-cour-de-cassation-va-t-elle-reconnaitre-les-parents-d-intention.php)

L’intervenant dit que les techniques permettant des fécondations impossibles dans la nature, cela serait accepté ou non contrôlé par la loi ?  Retour au texte

5 oui transhumaniste humble est un oxymore. l’archétype du transhumaniste c’est Elon Musk qui veut creuser des galeries avec une sorte de trains à air comprimé sous Los Angeles pour résoudre les embouteillages, et en même temps envoyer des hommes sur Mars : solutionnisme technologique et course en avant absolus.

Et surtout influencer la science, car préparer les esprits à quelque-chose qui n’existe pas encore c’est vouloir et permettre que ça advienne.

 Est-ce que ça ne part déjà de l’idée que le corps est séparé de son environnement, le cerveau du corps et qu’entre toutes ces entités distinctes circulent des informations. Tim Ingold s’est intéressé à la dissociation de l’esprit et de la main, soulignant en particulier que tout mouvement de l’individu (esprit/corps)  est indissociable de son environnement. Retour au texte

8 je ne comprends pas trop ces histoires de transcendance qui contrebalancerait la quête de puissance, ça fait penser un peu à de la rédemption, au rachat moral après coup)[A mon avis (HLM), elle n'aborde pas le sujet d'un point de vue religieux. C'est plutôt que si on peut être modifié, nous pouvons être considérés comme des produits]. Retour au texte

10 je trouve quand même que l’incarnation, « verbe qui se fait chair » est assez idéaliste; en gros l’idée pré-existe au vivant et savoir si on peut combattre le transhumanisme avec ça car lui aussi veut bâtir la vie sur plan. Du coup je ne comprends pas cette nuance de mutation. Retour au texte