Introduction au vendredi après-midi
Des écrans partout : un état des lieux au quotidien
Par Jean-françois Herouard, modérateur
Nous entamons la séquence de l’après-midi qui est une table ronde. Nos intervenantes sont Anne-Lise Ducanda et Carole Vanhoutte. Et j’ai demandé à Karine Mauvilly de nous rejoindre. Car si c’est deux professionnelles ont affaire dans leur cabinet à des maux et des symptômes qu’ils vont nous décrire, ce sont ceux aussi que l’on observe à l’école. Une enseignante, même si Karine s’est retirée du système, « enseignante un jour, enseignante toujours », aura des apports issus de son vécu. Nos deux intervenantes vont maintenant se présenter : quel métier elles exercent et préciser quel est leur poste d’observation
Présentation des intervenants
Anne-Lise Ducanda, médecin de PMI dans la ville de Viry-Chatillon dans l'Essonne
Je vais vous dresser quelque chose qui va peut-être vous faire peur, mais laissant voir des lueurs d'espoir.
Médecin de PMI depuis 15 ans, je fais partie d'un service public territorial, payé par vos impôts. Les parents peuvent venir en consultation gratuitement avec leur bébé de zéro jusqu'à trois ans. Je suis aussi médecin scolaire des petites et moyennes sections, Deux casquettes, qui font que je rencontre une trentaine d'enfants par semaine, une partie en consultation de bébés, le reste étant les enfants des écoles. Normalement je fais des consultations de dépistage, mais depuis 5 ans je n'ai plus le temps de les faire car on me demande de voir des enfants de petites et grandes sections et qui sont en très grande difficulté, incapables d'être élève, voire d'être scolarisés : les troubles explosent.
Les constats étant tellement alarmants, on m'a demandé de réaliser une vidéo à mettre sur le web pour présenter ce qui se passait. Depuis mars 2017, celle-ci a été vue 155 000 fois. Contactée ensuite par Carole Vanhoutte et d'autres professionnels, on a créé le collectif COSE, réunissant 10 personnes pédopsychiatres, orthophonistes, médecins et professeurs.
Contactée ensuite par les médias, j'ai présenté dernièrement au journal de TF1, le cas d'un petit garçon avec ses troubles. Vu plus de 1 million de fois ensuite, le côté optimiste est que nous avons porté l'alerte sur ce fléau de santé public chez les petits.
Carole Vanhoutte, orthophoniste dans le Val de Marne depuis 20 ans,
Ayant vu les choses évoluer, depuis 7 ans j'alerte sur le fait de la surexposition des écrans des enfants. Avec d'autres orthophonistes qui font partie du collectif, nous nous sommes posé la question : savoir ce qui provoque ces changements, voyant arriver en consultation de plus en plus de jeunes enfants entre 2,5 et 3 ans. Soit 50% des patients que je reçois, ce qui n'était pas le cas il y a 20 ans. On nous oppose qu'il y a de plus en plus de dépistage. Le soin c'est bien mais nous étions désespérés devant ce qui se passait, et sans être vraiment reconnu par les médecins pour notre rôle, consistant à alerter, dénoncer la gravité et l’ampleur des symptômes.
Quoi proposer pour faire face à ce que l'on voyait : sortir de nos cabinets pour aller faire de la prévention, parler de quoi l'enfant a besoin pour se développer - du langage, du jeu - et parler de l'exposition aux écrans. Et une association a été créée Joue, Pense, Parle. Après avoir vu la vidéo d'Anne-Lise, et l'ayant contactée, nous avons échangé sur nos regards portés sur les enfants.