Rencontres 2024
La technique
dans la montée de l'autoritarisme
Centre International de culture populaire
21 ter rue Voltaire - 75011
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Présentation
A l'heure où le projet de loi olympique autorise le recours aux algorithmes pour le contrôle des citoyens par la reconnaissance faciale et la vidéo-surveillance ; à l'heure où des vagues d'arrestations et de perquisitions ont récemment frappé des militantes et militants écologistes, pouvons-nous parler de « montée » de l'autoritarisme dans notre civilisation occidentale ? Le déferlement technique contemporain nous laisserait-il même envisager une victoire totale de l'autoritarisme, comme on peut envisager une victoire totale du capitalisme ?
Ces événements s'inscrivent dans une longue histoire. Pour Lewis Mumford, l'organisation centralisée, incarnation du processus de rationalisation, serait la première « technique » en cause. Il a nommé « Machine » cette domination physique, organisée sous la férule d'un roi, d'un empereur tout puissant (« le centre »), dans laquelle l'homme n'est plus qu'un rouage. A partir de la révolution industrielle, le « centre » sera de plus en plus intégré au système comprenant l'élite technocratique, scientifique, le système normatif, bureaucratique, l'organisation du travail, l'automatisation, mais aussi chaque membre de la communauté qui y prendra part, à qui il sera promis les retombées bénéfiques du système.
L'autoritarisme aujourd'hui qui s'impose à nous dans tous les pans de nos vies, semble ne nous laisser aucun choix. Il agit par la répression sur les groupes dont les solidarités et les liens, menaces pour le système doivent disparaître, ou plus insidieusement en suscitant l'adhésion, sans coercition, par diverses techniques de propagande, de fabrique de consentement, par le primat de l'expertise, de la technocratie et des normes sur les valeurs humaines, par les injonctions à nous adapter. Il s'agit d'une organisation à grande échelle à même de gérer et contrôler des masses tout en nous donnant l'illusion de la liberté individuelle : nous sommes tous libres... d'obéir (1).
Le cas de l' « intelligence » artificielle (IA) est particulièrement inquiétant à cet égard. La « Machine » exerce un contrôle sur les fondements de ce qui nous rend humains (la créativité, l'effort, le langage, la sensibilité, la socialisation) et contribue à brouiller les repères entre réalité et monde virtuel, entre vérité et mensonge. Les algorithmes sont des exécutants sans « états d'âme ».
L'IA constitue donc un des outils privilégié de consolidation des pouvoirs autoritaires : l'automatisation de la prise décision, de l'application des procédures, des interactions avec les administrations est désormais systématisée. Privés de toute capacité d'initiative et de négociation, il ne reste aux citoyens qu'à docilement obtempérer !
Aujourd'hui c'est bien dans tous les domaines de notre vie que la technique permet au pouvoir en place de se consolider : la santé et le poids croissant des techniques de management et des outils techniques ; l'agriculture et la disparition du paysan au profit de l'entrepreneur agricole assisté par ordinateur et bientôt par drone ; l'enseignement où les professeurs sont de plus en plus contraints et contrôlés par le numérique.
Au vu des tendances lourdes à l'oeuvre, pouvons-nous aujourd'hui craindre une victoire totale de l'autoritarisme par la technique, menant à l'obsolescence de l'homme ? Nous préférons quant à nous défendre les techniques démocratiques « dirigées par l'homme, relativement faibles, mais ingénieuses et durables ».
« Il faut transmettre l'autorité, actuellement aux mains de la machine collective, à la personnalité humaine et au groupe autonome » (2)
(1) Voir « Libres d'obéir », Johann Chapoutot, Gallimard, 2020
(2) « Technique autoritaire et technique démocratique », Lewis Mumford, 1963
Programme
Vendredi matin – 9h à 12h30
- 9h : Accueil
- Présentation des Rencontres
- 9h30 : Techniques et formes sociales d'après Lewis Mumford - Annie Gouilleux
- 10h : Généalogie de l'autoritarisme technicien - François Jarrige
- 10h30 : La technocratie, classe de puissance à l'ère technologique - PMO
- 11h : Débat
Pause déjeuner
Vendredi après-midi – 14 à 17h30
- 14h : Edouard Bernays et la technique de la propagande – Olivier Leduc
- 14h30 : Le rôle de la numérisation du monde dans les formes contemporaines d'autoritarisme - Matthieu Amiech
- 15h : …Pause…
- 15h30 : Robots-tueurs et déshumanisation digitale - Anne-Sophie Simpere
- 16h : Débat
Samedi matin – 9h30 à 12h30
- 9h30 : Accueil
- 10h : Régir un Etat Nucléaire : perspectives depuis la campagne meusienne – Un opposant au centre d’enfouissement de Bure
- 10h30 : Comment mettre fin à l'autoritarisme techno-industriel ? - ATR
- 11h : Débat
- Conclusion
Contact et informations : rencontres@technologos.fr
Moyens d'accès
Métro : L9 rue des Boulets , L2 Alexandre Dumas ou Avron, RER A Nation
Bus : L71 Philippe Auguste, L56 rue des Boulets
Biographie
Annie Gouilleux est traductrice et spécialiste de l’œuvre de Lewis Mumford. Elle a notamment traduit les ouvrages suivants :
* Le mythe de la machine. tome 1 (Technique et développement humain), auteur Lewis Mumford, à l'Enclyclopédie des Nuisances, 2019. Le tome 2 est en cours de parution.
* Technique autoritaire et technique démocratique (auteur L. Mumford), Ed. La Lenteur, paru en 2021.
* Art et technique. Six conférences de 1951 (L. Mumford), avec Bernard Pécheur, Ed. La Lenteur 2024.
* Elle a écrit de nombreux articles pour la revue « L’Inventaire ».
François Jarrige est historien, maître de Conférences à l’Université de Bourgogne et ancien membre de l’Institut Universitaire de France. Il s’intéresse à l’histoire du travail, de l’industrialisation et des techniques.
Ouvrages récents :
* On arrête (parfois) le progrès, Histoire et décroissance, L'Échappée, collection "Le pas de côté", 2022
* Jean Claude Farcy à l’œuvre. Des champs aux tribunaux - en co-direction avec Laurence Guignard et Odile Roynette -, Dijon, EUD, 2023.
* Le flottage du bois en Europe. Economies, sociétés et environnements - en co-direction avec Nicolas Jacob et Dimitri Langoureau -, Dijon, EUD, 2023.
* Décroissances. Regards croisés sur les urgences du temps - en co-direction avec Hélène Tordjman -, Paris, Le passager Clandestin, 2023.
* La ronde des bêtes. Le moteur animal et la fabrique de la Modernité, Paris, la Découverte, 2023.
PMO (Pièce et main d’œuvre). Depuis 2000, PMO est un groupe grenoblois qui est engagé dans la critique radicale de la recherche scientifique, des nanotechnologies, du transhumanisme, de l’industrie du nucléaire et du fichage informatique. Le 1er juin 2006, PMO a participé à l’organisation de la première manifestation publique, à Grenoble, contre les nanotechnologies.
En 2010, le groupe s’est vu discerner le Big Brother Award pour sa réflexion sur l’aspect totalitaire de la technoscience.
Olivier Leduc est un scientifique de formation et de profession qui pratique la philosophe des sciences par intérêt. Il est conseiller scientifique pour plusieurs associations (OGM, brevets, forçage génétique, gains de fonction, etc).
Mathieu Amiech s’intéresse, entre autre, à l’autoritarisme des technologies numériques, leur influence sur la liberté humaine et leurs nuisances écologiques. Il est sociologue de formation et a été très tôt convaincu par les écrits publiés par les éditions de l’Encyclopédie des nuisances. Au cœur de son travail d’éditeur (La Lenteur) se trouve désormais la critique de l’information et de la technologie, au centre du capitalisme contemporain, ainsi que la recherche d’une réelle interdépendance dans le monde et d’une spiritualité réconciliant ce que le capitalisme a desséché : le lien et le sens.
Parmi ses ouvrages récents :
* Le cauchemar de Don Quichotte. Sur l’impuissance de la jeunesse d’aujourd’hui - avec Julien Mattern - Ed. Climats, 2004.
* La technocratie en marche, Ed. Le Monde à l’envers, 2017.
* Peut-on s’opposer à l’informatisation de nos vies Interventions et entretiens, Ed. La lenteur, 2024.
Anne-Sophie Simpere est juriste de formation et a travaillé dans des ONG comme « les Amis de la Terre », « Greenpeace », « Bankwatch », « Samata » et Médecins du Monde».
* Elle est co-autrice de Comment l'Etat s'attaque à nos Libertés. Ed. Plon, 2022.
* Police partout, justice nulle part, Ed. Massot, 2023.
Max, un opposant au centre d’enfouissements de déchets nucléaires à Bure
Max se présente ainsi : sa trajectoire politique, issue des courants anarchistes et de la critique de la société industrielle, l'a amené à considérer le nucléaire comme un élément saillant où se croisaient l'autoritarisme étatique, la démesure de la complexité technique et le désir de toute-puissance qu'incarne la Bombe ou des projets comme ITER.
Il a donc voulu arrêter de contribuer activement à la perpétuation de ce système en quittant son activité salariée en 2017 et il est venu habiter à Bure car il lui semblait qu'il y avait là un levier pour agir sur ces thématiques. Cette lutte est depuis son "activité principale" et il habite toujours en Meuse.
Collectif ATR
ATR se présente comme un mouvement légal et non violent qui a fait le choix stratégique de prendre la technologie pour cheval de bataille. En à peine deux siècles, le système engendré par la révolution industrielle est en train de causer l’une des plus grandes perturbations climatiques de l’histoire terrestre, et il a multiplié par cent à mille fois le taux d’extinction des espèces vivantes. Ethnocides et génocides n’ont jamais été aussi nombreux et meurtriers. Le contrôle, la surveillance et la répression s’intensifient chaque année. L’extractivisme et l’artificialisation des terres accélèrent tandis que tous les écosystèmes – y compris notre chair et notre sang – sont massivement contaminés par toutes sortes de polluants d’origine industrielle. Le système techno-industriel menace désormais d’éradiquer toutes les formes de vie – espèce humaine incluse – et les fanatiques de la machine s’en réjouissent.