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La Cité des Sciences (du scientisme !?) oublie
l'association AFCIA contre l'intelligence artificielle

Comme le paléo-anthropologue Pascal Picq, (voir le dernier texte de PMO à son sujet) le philosophe et sociologue Raphaël Liogier dans son séminaire au Collège International de Philosophie consacré au transhumanisme, appelle à "s'adapter" à l'invasion des robots. Il ignore la matérialité (l'empreinte écologique, le coût en extraction de matières premières, en mines, et le coût énergétique de tout l'input des robots, les intrants) des prétendues machines immatérielles, qui bientôt, selon lui, fabriqueront tout à notre place, et nous délivreront de la malédiction du travail (torture, "tripalium") et du statut indigne qu'est celui de n'être qu'un employé : ce sera la fin heureuse de l'emploi (son livre= "Sans emploi, condition de l'homme post-industriel"(2016), et à la place, les gens vivront d'activités libres donc épanouissantes, de leur choix, et le nécessaire pour leur subsistance confortable viendra non plus d'un salaire en échange d'un travail dans le monde de la production, mais d'un revenu d'existence élevé (il parle de 1800 euros) distribué à tout le monde.

Nota :

Je suis moi aussi partisan de la fin du travail, du salariat, du monde de l'emploi, et je me bats pour l'abolition de l'ouvriérat aussi horrible pour moi que l'esclavage, mais par un tout autre chemin : celui de la dénonciation du tropisme prétendu fatal que serait celui de la puissance, donc la dénonciation de l'Etat, et plus largement de la civilisation, signe de folie des grandeurs. A la place je prône la multiplication des petites "sylvilisations", donc le retour aux milliers de langues locales, chacune pratiquant l'artisanalisme à la place de l'industrialisme, : tout se fait à la main, avec art, lenteur et douceur, sans la moindre hiérarchie, qu'avec des moyens simples assurant la transparence des moyens de production. C'est l'enveloppement à la place du développement, l'enveloppement étant l'art de vivre modestement et discrètement avec la plus faible empreinte écologique possible de façon à laisser toute la place nécessaire à l'épanouissement de toutes les espèces animales et végétales (biodiversité maximum alliée au maximum d'ethnodiversité). Le tout grâce à des visions du monde biocentriques en lieu et place des visions du monde anthropocentriques qui ont le tord de doper l'orgueil humain, ce que font hélas les Trois monothéismes...Lire à ce sujet sur le site =partage-le.com : Permaculture, agroécologie, jardins-forêt : des savoirs millénaires, et mes autres textes sur ce site de Deep Green Resistance-France comme "Les racines historiques de la catastrophe climatique qui se précise."

Liogier en est encore au vieux culte de l'histoire mondiale et linéaire de l'humanité, culte du "dieu progrès", en trois stades qu'il nomme "paléolithique, néolithique, âge des robots.
Paléolithique = survivre péniblement, précarité, rareté (selon lui)
Néolithique, de Sumer aux Grandes Civilisations, il y situe les débuts du capitalisme = survivre mieux
Et maintenant= l'Age des robots = enfin l'abondance, qui va être gérée par le "mode de production interactif", avec une "technoscience décisionnelle", une technoscience empathique avec subjectivation des objets, plaisir d'être, de se distinguer par le luxe, un tropisme qu'il estime constitutif des humains.

PMO souligne que pour Liogier, refuser les progrès annoncés par les transhumanistes revient à une forme de frilosité nationaliste, une sorte de repli sur soi, un aveuglement qui empêche de voir que le bonheur viendra des machines qui feront tout à notre place et de l'artificialisation de notre code génétique (humains OGM) pour se débarasser de la lenteur ankylosante de l'antique évolution darwinienne, seulement basée sur les mutations aléatoires et la sélection des plus adaptés...
Si on lui parle des limites énergétiques, de Energy Return On Energy Invested (EROEI), il répond :"merveille de l'énergie solaire illimitée", donc ignore totalement par exemple l'essai de Hall : Spain photovoltaic revolution, ed. Springer, sur le coût matériel en intrants et en énergie en amont qu'induit l'appareillage nécessaire à la captation et la concentration de l'énergie solaire.
Si on lui parle "explosion démographique", il répond qu'on en est déjà à la stabilisation grâce à la "transition démographique".
Si on lui parle de la nécessité de continuer à creuser des mines partout pour fabriquer les robots, et donc de continuer à précipiter l'épuisement des ressources minières, il rétorque qu'avec les NBIC et la systématisation du recyclage, ajouté au fait que tout sera miniaturisé et donc économe en constituants matériels, il n'y aura plus cette limite écologique non plus, en citant ad nauseam Jeremy Rifkin.

Bref, Liogier était connu pour sa naïveté au sujet du Coran, refusant de voir que l'intégrisme ou le fondamentalisme musulman mène fatalement :
- par simple obéissance, soumission (sens du mot "islam") aux sourates du Livre Sacré écrit par Dieu, le seul, le vrai (Allah Akbar)
- à la violence, à la mise à mort des personnes qui injurie Dieu en ne se convertissant pas...(voir son livre, CNRS 2016)
Désormais Liogier est aussi à dénoncer pour son attitude dévote devant la notion de "progrès", d'"évolution" et sa croyance aux bienfaits de la technique.

Je rappellerai que cette naïveté fut longtemps le propre de la gauche (lire Blouin, édité par PMO, sur le technoscientisme des idéologues de la révolution de 1917) et même de l'extrême gauche par exemple situationiste, comme l'a démontré Mandosio dans son essai "Dans le chaudron du négatif" ed. de l'Encyclopédie des Nuisances.

Thierry Sallantin, octobre 2017

Notes complémentaires

Article rédigé en réaction au programme de la Cité des Sciences à Paris, programme très en faveur de l' "intelligence artificielle"...

Association française contre l'intelligence artificielle = AFCIA
http://afcia-association.fr animée par Cédric Sauviat.
Cette association appelle à l' "interdiction pure et simple de la recherche en intelligence artificielle".
Cela rappelle la position du mathématicien Alexandre Grothendieck dans sa célèbre communication au CERN à Genève en 1972  "Allons -nous arrêter la recherche scientifique".