Médias 

Régulièrement, les actionnaires rappellent aux officines de presse qu'elles sont des entreprises et qu'en conséquence elles sont tenues de faire du chiffre. De façon insidieuse, il importe donc moins au journaliste de soumettre les faits au jugement critique que de les rendre "vendeurs", quitte àen fabriquer de toutes pièces, et tant qu'à faire les plus spectaculaires possible. Ainsi par exemple quand BMTV interviewe un preneur d'otâges en direct ou que France 2  invite un  dictateur sur un plateau télé. Mais peut-on encore parler de "liberté de la presse" quand celle-ci dépend à ce point des parts de marché ?

Bien que cruciale, cette question semble dépassée quand, dans les salles de rédaction, des automates rédigent des articles sans aucune assistance humaine et qu'au Japon, des robots humanoïdes assurent la présentation de journaux télévisés. Une nouvelle question se pose alors : les technologies ne sont-elles pas en train de saper les fondements même du métier de journaliste ?

A l'évidence en tout cas, la dictature des marchés ne fait pas tout. Dès les années 1960, Marshall McLuhan affirmait que, quels que soient les contenus véhiculés, dans une société massifiée, les moyens utilisé formatent les esprits. Non seulement la prolifération des informations rend difficile leur interprétation (trop d'infos tuent l'info) mais la majorité d'entre elles étant anxiogènes, elles appellent une compensation. Le divertissement exerce alors  la fonction de diversion.

En connivence avec les politiques, qui ne peuvent se passer d'eux, les médias constituent ce que Chomsky appelle la "fabrique de l'opinion". Mais faut-il pour autant parler de complot ? Nombreux sont les individus qui, en fait de rechercher l’information, sont en quête de propagande rassurante. Qui plus est, à force de SMS, de mails et de tweets, ils font eux-mêmes celle des objets techniques, sans lesquels ils se sentiraient démunis et non reconnus.

Si les robots prennent la place des journalistes comme ils ont auparavant pris celle des caissières, des guichetiers et des traders, pourquoi alors s'obstine t-on à croire que la technique est un processus idéologiquement neutre ?

La presse entre audimat et actionnaires
Les journalistes font-ils de l'intox et/ou sont-ils instrumentalisés ?

 DÉBAT 

Hervé Kempf (journaliste, rédacteur en chef de Reporterre)
Blaise Magnin (membre de l'Association-Critique-Médias, Acrimed)


Mardi 12 mai
17h15 - 19h45

Institut d'Études Politiques
25, rue Gaston de Saporta
Aix-en-Provence